Un guide dédié à l’accompagnement des parents a été tout récemment publié par la DTN. Mélanie Maillard, psychologue clinicienne en charge pour la FFT du Développement de la dimension mentale et psychologique auprès des territoires, revient sur le contenu de cet outil disponible notamment dans les clubs.
Pourriez-vous rappeler pourquoi il est important d’impliquer les parents et de les accompagner ?
Depuis maintenant trois ans, la volonté de faire des parents des partenaires éducatifs est au cœur de la politique fédérale. Ils sont essentiels, en permanence sollicités dès que l’enfant se tourne vers la compétition. Il est important qu’ils soient des accompagnateurs “suffisamment bons”, qu’ils puissent tenir leur rôle avec la distance nécessaire pour que le match et la compétition soient des lieux d’apprentissage et d’évolution pour leurs enfants, et non des lieux dans lesquels ils se sentent trop insécurisés. Dès l’entrée des parents dans notre Fédération, dans nos clubs, nous pouvons mieux les préparer à comprendre les spécificités que notre sport va faire vivre à l’enfant qu’ils nous confient.
À qui ce guide s’adresse-t-il ?
Il s’adresse à tous les parents et pas seulement à ceux dont les enfants sont repérés, même si une partie leur est dédiée. Plus les parents seront informés et accompagnés, plus ils seront en capacité de laisser leur enfant vivre son activité pleinement et jouer. Au cœur de l’activité réside le match, que ce soit des matchs d’entraînement, en plateaux, par équipes, libres, en tournoi. Le guide cherche à leur faire comprendre ce que le match est réellement : un levier de construction de l’enfant, un jeu créatif qui permet de multiples apprentissages. Nous pensons qu’un parent conscient devient plus soutenant.
Au-delà d’informer, ce guide a-t-il un autre but recherché ?
Oui, notamment aider le parent à savoir quelle est sa place et comment il peut la tenir. Ce guide lui dit qu’il a un rôle, mais qu’il a aussi une distance à respecter pour que l’enfant puisse vivre pleinement ses expériences et faire ses propres apprentissages, à son rythme. Oui, nous insistons pour remettre le match au cœur de l’enseignement et de la vie du tennis. Or le match est un lieu à haut potentiel émotionnel pour le parent, car il y a défaite ou victoire. Il est important d’amener les parents à mieux comprendre l’intérêt du match, au-delà du résultat, dans la construction de l’enfant. Notre souhait est qu’il y ait une connaissance beaucoup plus claire de ce que le match permet, comme outil, en plus de l’entraînement. Et que tous prennent bien conscience que le but dans l’enseignement du tennis, c’est le match !
En quoi est-il essentiel d’insister justement sur la complexité de la compétition ?
La compétition pourrait être super à vivre, mais par le passé, on n’a peut-être pas suffisamment permis aux parents de trouver la bonne distance et de se poser les bonnes questions : « Comment trouver cette bonne distance émotionnelle et être une belle énergie soutenante ? Est-ce d’ailleurs possible ? Comment faire avec ce que je vis à l’intérieur de moi ? Comment le laisser faire en autonomie dans ce jeu avec ses règles, ses lois et tout ce que ça sollicite en lui ? ». Le match peut paraître simple, mais il est complexe, car il est multidimensionnel et sollicite en même temps des compétences mentales, émotionnelles, physiques, tactico-techniques face à un adversaire. À travers ce guide, nous avons bien sûr voulu nous mettre à la place du parent, lui montrer que nous sommes conscients de ses problématiques, tout en lui faisant comprendre que ce n’est pas si simple pour l’enfant. Simple, non ! Riche, oui ! Nous pensons profondément que le tennis peut être une école de vie pour la vie.
Qu’espérez-vous de ce guide ?
Que chacun se sente bien, à sa place, à commencer par l’enfant à sa place d’apprenant. Qu’il soit reconnu aussi dans sa singularité et son désir propre. D’autre part, nous voulons que le parent ressente qu’il est bien reçu et qu’il peut nous faire confiance. À travers la dimension mentale et psychologique qu’on va renforcer via ce document, notre but est que le parent comprenne qu’on aide les enfants à être plus créatifs, plus intelligents émotionnellement et donc aussi plus intelligents relationnellement. Enfin, nous espérons que l’enseignant se rappelle que son métier est un métier humain hautement relationnel. Il a donc besoin continuellement de questionner sa posture d’éducateur et de développer ses compétences émotionnelles. Ainsi, il pourra mieux se calibrer à ses élèves et leur environnement. Nous espérons que ce guide va le renforcer dans sa mission éducative, sociétale, et peut-être même consolider ou redonner du sens à son rôle, qui est bien plus vaste que le simple fait d’aider un enfant à acquérir une technique.
Qu’attendez-vous justement des enseignants par rapport à ce guide ?
Ils ont un rôle de transmission des éléments phares de ce guide. À eux de créer des espaces pour rencontrer les parents, échanger en collectif et en individuel. D’ailleurs, dans ce but, le guide va être également partagé, réfléchi, discuté dès la formation initiale de DEJEPS. Et pourquoi pas aussi le transmettre auprès de leur employeur ? Ce serait idéal de faire bouger les lignes au niveau des élus et des présidents de club qui pourraient accorder un temps salarié dédié à cette mission qui fait partie du travail de l’enseignant. L’idée serait que les dirigeants ajoutent ces temps de travail dans les fiches de mission de leurs entraîneurs. Il nous semble primordial qu’ils réfléchissent à ce point si important pour les clubs, car plus les parents seront informés, conscients et intégrés, plus il leur sera facile de nous confier leur enfant et plus l’enfant progressera, ce qui mènera potentiellement aussi à une plus grande fidélisation.
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