Damien Dumusois a eu l'honneur d'arbitrer la dernière finale messieurs de l'Open d'Australie. Le Bourguignon, l'un des badges d'or du circuit mondial, évoque cette expérience australienne et la qualité de l'arbitrage à la française.
Il y a une dizaine de jours, vous avez arbitré le match entre Jannik Sinner et Alexander Zverev à l'Open d'Australie, votre 12e finale en Grand Chelem sur la chaise. Comment avez-vous vécu cette rencontre ?
Damien Dumusois : Comme les autres. J'essaye d'aborder les finales de Grand Chelem comme un match tout à fait normal. Il y a toujours un peu plus de communication, de gestion de match et d'attention médiatique mais rien de bien particulier.
L'expérience en Australie est quand même différente ?
Complètement. Pour nous, Européens, qui sommes normalement en plein hiver, participer à l'Open d'Australie signifie passer un mois au soleil. Les gens viennent au tournoi en bermudas et t-shirt. Le site est fait pour que les spectateurs ne viennent pas voir que le tennis mais puissent participer à d'autres activités. C'est vraiment le "Happy Slam".
Votre carrière est désormais très bien remplie. Qu'est-ce qu'il vous "manque" professionnellement désormais ?
C'est une très bonne question ! J'ai eu la chance de faire des finales en Grand Chelem, aux Jeux Olympiques... Je n'ai pas arbitré toutes les finales dames en Majeur par exemple, mais je ne vais pas chercher des finales spécifiquement. En tant qu'arbitre de chaise, on fait notre travail, on essaye de donner le meilleur pour aller le plus loin possible lors des tournois.
On n'y arrive pas toujours et il y a d'autres paramètres qui entrent en compte dans les choix, notamment le critère des nationalités. J'ai encore quelques objectifs à atteindre mais je ne me dis pas "je veux faire cette finale ou ce tournoi".
Alors quelles sont vos ambitions ?
L'arbitrage, c'est se remettre en question constamment. En ce moment, on parle beaucoup du Live ELC (l’arbitrage électronique). J'aimerais bien tenter cette expérience sur terre battue ou dans des tournois que je connais peu.
Notre métier implique de se challenger pour être constamment en progression, d'être à jour au niveau des nouvelles technologies. Je souhaite aussi continuer de m'impliquer dans la partie formation et développement de l'arbitrage, que ce soit en France ou en Afrique.
Quand vous avez commencé l'arbitrage, aviez-vous imaginé réaliser cette carrière ?
Pas du tout ! Au départ, c'était juste pour dépanner mon club. Je me disais simplement que ça allait me permettre de voyager avec l'équipe première. Je ne voyais pas le côté "job", les conséquences que ça pouvait avoir. Mais j'y ai pris rapidement goût. J'ai passé le trophée national du jeune arbitre en 1994. J'ai un peu arrêté pour terminer mes études puis j'ai repris dans les années 1999 / 2000.
En tant qu'arbitre, vous êtes un témoin privilégié de l'évolution du jeu. Depuis vos premières années, le tennis a-t-il changé ?
C'est difficile à dire. Sur notre chaise, on est tellement "dedans", tellement concentrés... Est-ce que c'est plus puissant ? Plus rapide ? Je ne sais pas. C'est différent en tout cas, car les joueurs sont différents. C'est plus physique, oui. Les athlètes sont prêts plus jeunes. Tout est plus professionnel. Je ne dirais donc pas que le niveau est meilleur, c'est juste différent.
D'un point de vue global, l'arbitrage français est toujours reconnu pour son excellence. Pour quelles raisons ?
C'est une tradition. Récemment, deux arbitres français ont été promus, un badge argent et un autre badge or. L'héritage se poursuit. Pourquoi ? Parce qu'il y a une excellente formation dès le début, au niveau des comités et au niveau des ligues. La FFT prend le relais mais nous aussi, en tant qu'arbitres haut gradés. On essaie de "driver" les jeunes qui arrivent pour qu'ils s'éclatent et arrivent au plus haut niveau. J'ai l'habitude de dire : "Il y a de la place pour tout le monde, il faut juste se la faire".
À savoir
Damien Dumusois fait partie des sept arbitres français badges d'or, la plus haute distinction de l'arbitrage international. Les autres sont : Pierre Bacchi et Kader Nouni à la WTA, Renaud Lichtenstein et Aurélie Tourte à l'ATP, Arnaud Gabas et également Manuel Absolu, qui vient tout juste d'être promu.