Après huit années passées sur le circuit ITF où elle a atteint la 9e place mondiale, Charlotte Famin, numéro un française de tennis-fauteuil, a décidé de raccrocher après un dernier Roland-Garros.
Retour sur une carrière riche en émotions.
Pourquoi avez-vous décidé d’arrêter votre carrière maintenant ?
Charlotte Famin : Ma fin de carrière était prévue en octobre après les Jeux Paralympiques de Tokyo. Je m’étais préparée physiquement et mentalement pour arrêter après cette compétition. Et quand ils ont décidé de reporter les Jeux, je ne me suis pas senti la force de continuer un an de plus.
Quand avez-vous vraiment pris votre décision ?
C.F. : Assez tard en fait ! Dès qu’ils ont annoncé le report des Jeux de Tokyo je me suis posée beaucoup de questions. On n’avait aucune visibilité sur la reprise du circuit international. J’ai continué à m’entraîner après le confinement et j’ai décidé de faire deux tournois : le French Riviera Open et Roland-Garros. J’avais déjà presque pris ma décision mais le fait de disputer ces deux tournois dans les conditions sanitaires actuelles m’a confortée. Ma motivation et mon envie n’étaient plus les mêmes. Je sentais bien que mentalement j’avais moins de motivation.
Comment avez-vous vécu votre dernier Roland-Garros ?
C.F. : J’étais contente d’y être même si les conditions étaient particulières cette année et que, pour moi qui partage beaucoup ma vie sur le circuit avec ma famille et mes proches, c’était vraiment différent car j’étais toute seule avec ma coach. J’étais contente de finir à Roland-Garros surtout que j’ai fait un bon dernier match mais il y a forcément eu moins d’émotions.
Comment vous sentez-vous en ce début de retraite ?
C.F. : J’ai eu un pincement au cœur quand tout s’est arrêté il y a quelques mois parce que c’était brutal mais aujourd’hui je suis très sereine.
Que vous a apporté votre carrière ?
C.F. : Ça m’a un peu sauvé la vie. Quand j’ai commencé le tennis en 2012, quatre ans après mon accident, je ne cherchais pas forcément la performance pure. Il fallait que je sois dans un environnement où je me sente bien, où je pouvais me prouver que je pouvais faire des choses, que ce n’était pas fini. C’était pour accepter un peu plus le handicap. Ça a marché donc j’ai continué et ça m’a permis de vivre beaucoup de choses mais ce qui était le plus important c’était de partager tout ça avec mes proches. A l’image des Jeux de Rio où ils étaient 18 à avoir fait le déplacement. C’était magique et ça reste le meilleur souvenir de ma carrière qui n’aurait pas eu la même saveur sans ça !
Charlotte Famin entourée de ses proches à Rio
Allez-vous continuer à jouer ?
C.F. : Oui je vais essayer de jouer 3 à 4h par semaine à l’USM Blainville pour m’entretenir physiquement et comme ça sera juste du loisir, il n’y aura pas de stress. Je jouerai détendue et je pense que je me blesserai moins. Je vais aussi aller nager. Après huit ans de tennis, je pense qu’un peu de natation me fera du bien pour détendre un peu mon haut du corps.
Avant les Jeux Olympiques de Rio, j’avais d'ailleurs fait assez peu de tennis le mois précédant la compétition et j’avais beaucoup nagé en faisant du dos crawlé pour remettre les épaules en arrière et ça avait été une bonne préparation.
Avez-vous des projets en lien avec le tennis ?
C.F. : Je n’ai pas vraiment de projet bien défini mais je me suis toujours dit que ça serait bien de transmettre ce goût du sport et du dépassement de soi à des enfants ou des adultes en situation de handicap. Prêcher un peu la bonne parole du sport quand on se retrouve diminué du jour au lendemain. Je ne sais pas encore dans quel cadre je vais faire ça mais c’est vraiment une envie forte. Je pense que partager mon expérience et mon ressenti avec des enfants. Même s'ils ne sont pas forcément dans la même situation que moi ça peut aussi leur faire beaucoup de bien.
© L.Wacziak / FFT
Quelle va être votre reconversion ?
C.F. : J’ai été absorbée par ma vie sur le circuit et je n’ai jamais vraiment trop réfléchi à ce que je ferai après. J’ai plein d’envies, reprendre des études ou faire des formations… Mais je vais me laisser jusqu’à la fin de l’année pour me faire une idée plus précise de ce que j’ai vraiment envie de faire.
Quel regard portez-vous sur l’évolution du tennis fauteuil en France ?
C.F. : Il y a davantage de détection et de stages pour permettre aux jeunes joueurs de progresser et d’avoir de l’ambition. Tout ce que Patrick Labazuy et la fédération essaient de mettre en place est très positif. Je trouve qu’ils arrivent à donner l’envie aux joueurs de se dépasser. Paris 2024 permet une belle émulation que ça soit chez les filles ou les garçons, c’est bien !
Propos recueillis par Amandine Reymond
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